citations dans les romans d'AN

Amélie Nothomb aime truffer ses romans de citations ou de références à des auteurs du passé (plus ou moins récent). Je pense par exemple, pour citer quelque chose de très visible, à la discussion sur le sens d'une scène de la Chartreuse de Parme dans Mercure.
Certains lui reprochent cette pratique, qu'ils qualifient d'ostentation gratuite, d'étalage honteux de sa culture (j'ai lu un article où l'auteur disait [à peu près] que c'était une façon pour Nothomb de dire "regardez comme je suis intelligente dans ma jolie bibliothèque" !!!!)
Que pensez-vous de cet usage de la citation ?
est-ce que les citations dans les romans d'AN vous ont parfois fait découvrir des auteurs que vous n'auriez pas forcément lus sans cela ?

Je pense que mademoiselle Nothomb est très cultivée et que, dans ses romans comme dans la vie, elle aime beaucoup le montrer. On ne peut pas vraiment le lui reprocher. L'usage de la citation ne me déplaît pas du tout, ça n'a en rien perturbé ma lecture. En revanche non, ça ne m'a pas fait découvrir d'auteur. En lisant Poppy Z. Brite j'ai découvert des groupes de musiques, disons que j'ai eu la curiosité d'écouter les groupes dont elle parlait. Mais je n'ai pas ressenti ce besoin avec les auteurs chers à Nothomb. J'ai bien assez de choses à lire, je crois. Et puis ça fait con je trouve. Je sais pas, ça fait "Oh mon écrivain préférée a lu ça je vais vite faire comme elle"... Ce n'est pas terrible. Et puis ce n'est pas mon écrivain préféré, donc...

oscar.de.jarjayes a écrit:

Je pense que mademoiselle Nothomb est très cultivée et que, dans ses romans comme dans la vie, elle aime beaucoup le montrer.

Ah bon , tu la connais dans la vie ?

Par rapport au sujet , je l'avoue , j'ai lu un certain nombre de romans à cause d'elle , notamment "la chartreuse de Parme" ( que je n'ai pas aimé )

oscar.de.jarjayes a écrit:

Et puis ça fait con je trouve. Je sais pas, ça fait "Oh mon écrivain préférée a lu ça je vais vite faire comme elle"... Ce n'est pas terrible. Et puis ce n'est pas mon écrivain préféré, donc...

Evidemment, si la seule raison pour laquelle on se lance dans un livre est qu'il est cité par son "auteur préféré", je vous rejoins : ça fait con. Je dirais même plus : C'EST con !
Maintenant, on peut aussi voir les choses sous un angle plus positif et encourageant. On peut avoir été frappé par une citation dans un roman de Nothomb et vouloir lire l'oeuvre en entier, parce que ces quelque mots ont su piquer la curiosité. On peut aussi lire ces livres dans l'optique de mieux comprendre les romans de Nothomb (si on est un lecteur très trés motivé, je vous l'accorde). Pour reprendre encore l'exemple de la Chartreuse, ce roman tient une telle place dans Mercure qu'on peut se dire qu'il est nécessaire de le lire pour bien comprendre la discussion entre Françoise et Hazel.
L'effet de cette lecture peut d'ailleurs être surprenant.
On peut d'abord découvrir que ce livre qui est tellement vanté et magnifié dans Mercure, on ne l'aime pas tellement - d'où incompréhension vis-à-vis d'Hazel.
On peut aussi découvrir que les arguments utilisés par Hazel et Françoise pour interpréter la fameuse citation ("aucune résistance ne lui fut opposée") sont, comme toute lecture personnelle, aux antipodes de ce que l'on a éprouvé soi-même à la lecture de ce passage.
Bref, certaines de ces lectures peuvent nous amener à revoir en partie notre lecture des romans de Nothomb.

[hors-sujet] : je me demande laquelle, de Hazel ou de Françoise, est porteuse du point de vue de Nothomb sur la Chartreuse.

nausicaa a écrit:

[hors-sujet] : je me demande laquelle, de Hazel ou de Françoise, est porteuse du point de vue de Nothomb sur la Chartreuse.

Hazel , parce qu'elle l'a lu 64 fois.

sigh a écrit:

oscar.de.jarjayes a écrit:

Je pense que mademoiselle Nothomb est très cultivée et que, dans ses romans comme dans la vie, elle aime beaucoup le montrer.

Ah bon , tu la connais dans la vie ?

Pas très intimement, mais de ce que j'ai vu d'elle avec les gens, c'est vrai qu'elle ne rechigne jamais à montrer comme elle sait des choses et comme elle a tout lu. Même dans les interviewes qu'elle donne, on le sent très fort. Mais c'est vrai j'ignore si elle est comme ça "dans la vraie vie" avec ses amis proches. Je donne ma main à couper que oui, parce que cela a l'air d'être une composante importante de sa personnalité. En revanche je ne trouve pas que cela soit un défaut, ni même que ce soit dans une quelconque volonté d'étaler son savoir, non je pense que lorsqu'on est baigné en permanence dans la littérature comme dans la culture en général, on en parle beaucoup, on n'arrive plus à penser autrement. C'est comme quand on a touché à la philosophie, on ne pense plus vraiment par soi-même, finalement, on rapporte toujours ses opinions à des courants de pensée... Quand je parle politique je finis toujours par saouler tout le monde avec Hobbes, je ne pense pas que ce soit forcément pour étaler quoi que ce soit, mais plutôt parce que je suis forgé comme ça.

Je trouve aussi que les références et citations utilisées par AN sont généralement bien placées et judicieuses, même si nombreuses.
Il y a en fait juste une seule fois où cette manière d'écrire m'a un peu gênée. Ce n'était pas lors de la lecture, mais lorsque j'ai assisté à une représentation théâtrale de Cosmétique de l'ennemi. Alors qu'il "passait" très bien lors de ma lecture silencieuse, le passage où Textor cite Rimbaud ("je est un autre") et Pascal ("le moi est haïssable") faisait par contre très artificiel au théâtre. J'ai vraiment eu la désagréable impression qu'Amélie Nothomb avait choisi les deux phrases les plus célèbres sur le "moi" ou le "je" et qu'elle les avait collées là sans qu'elles soient tout à fait nécessaire.


Par contre, je trouve vraiment génial le passage sur la taxinomie des animaux par Tachandre de Lydie dans Les Catilinaires. Ce passage est évidemment très drôle, et je trouve brillante l'idée d'avoir inventé de toutes pièces un pseudo-auteur grec dans le cadre précis de cette discussion très pédante où Emile cherche seulement à se divertir aux dépens de son encombrant voisin. C'est peut-être aussi (j'ai très envie de le voir comme ça) de la part de Nothomb une manière de faire un peu d'ironie sur sa propre pratique de la citation et d'indiquer qu'elle est consciente elle-même de parfois frôler la pédanterie (du moins aux yeux de ses lecteurs ou détracteurs).